La langue française est probablement la langue qui offre le plus de diversité.
Il y a presque un mot pour chaque émotion et situation.
A titre anecdotique, lorsqu’un étranger apprend notre langue, il ressent beaucoup de difficultés pour évaluer le mot qui correspond à la situation dans laquelle il se trouve.
Utiliser les mots dans un contexte qui ne doit pas être le leur, c’est prendre le risque de créer un éventuel chaos relationnel.
A force de mauvaises habitudes linguistiques, on finit par dénaturer le sens des mots, sans pour autant se délester de leur pouvoir émotionnel, parce qu’ils ont une résonance culturelle.
Le pouvoir du mot « aimer »
L’emploi du mot « Aimer » déclenche des réactions émotionnelles que l’on ne souhaite pas totalement contrôler.
On aime sa famille, ses amis, ceux avec lesquels on ne met pas le filtre des sentiments.
Aimer c’est vivre pleinement une relation, sans constamment devoir contrôler ses émotions.
C’est aussi se surinvestir dans nos actions, sans se soucier d’éventuelles répercussions.
Or, dans les relations professionnelles il faut judicieusement choisir ses mots et précieusement doser ses émotions, pour protéger nos décisions, et prendre soin des relations.
Le dire n’est pas nécessairement le ressentir
Mais cela transforme instinctivement le contexte de nos décisions.
Le dangereux « Je l’aime bien «
Ces 3 mots qui résonnent agréablement élèvent notre seuil d’indulgence, puis bousculent les indicateurs « objectifs » de nos décisions vers la dangereuse attitude « d’excès de compassion ».
Pire, votre « excès de compassion » instaure une réciprocité pour le collaborateur concerné , déguisée sous le masque de la « loyauté », avec toutes les dérives que nous lui connaissons.
Le poisonneux « Je ne l’aime pas «
Ces 4 mots que l’on pourrait penser secrètement, que l’on partagerait discrètement, n’ont pour fonction mentale que d’affoler la boussole de nos émotions, et réduisent à néant la possibilité d’être bienveillant.
Plus vous entretiendrez cette spirale de pensée, moins vous aurez la capacité d’abaisser votre seuil « d’agressivité émotionnelle » ni vous offrir la possibilité de comprendre le sens de l’équité.
Hors des clous
A chaque fois que vous vous autorisez à penser ou prononcer que « vous aimez » ou « n’aimez pas » un collaborateur vous compromettez votre intégrité.
Les fortes émotions désactivent le siège cérébral des décisions, et ainsi agissent contre vous.
Même si vous vouliez contrer cet état, vous ne le pourriez pas.
Essayez de vous observer et vous comprendrez.
Ne pas s’attacher
Pour ne pas avoir à se détacher.
S’attacher, c’est tisser insidieusement une toile affective qui favorise les intérêts d’un individu plutôt que celui d’un autre, et officialise invisiblement un déséquilibre de management dans une équipe.
Plus dangereux, ce déséquilibre modifie la perception d’équité de vos décisions, et ne vous permet jamais ( très rarement) de faire appel à votre esprit rationnel.
Le pouvoir de « l’agréabilité » tend à nous rendre moins vigilant et plus complaisant.
Ne surtout pas « détester »
Si le mot est tabou, voire inavouable, il est pourtant bien (trop) présent (secrètement) chez certains managers qui s’échouent verbalement dedans pour ne pas se challenger personnellement.
En tombant dans la mauvaise posture émotionnelle, le manager inhibe volontairement sa capacité d’empathie et compromet les fondements de son rôle.
Un pied vers la sortie, l’autre dans l’inertie
S’autoriser à « ne pas aimer » un collaborateur ou un collègue, c’est accepter de ne pas travailler avec notre plus haut niveau intellectuel.
C’est sortir de son rôle de manager et ne jamais entrer dans celui du leader.
Lâchez la pression
Des sentiments qui n’ont pas leur place dans votre rôle.
Personne n’est payé pour aimer ou ne pas aimer, cela n’a jamais fait partie des prérequis.
La responsabilité est ailleurs
Il faut porter le masque de la neutralité.
C’est un exercice qui peut s’avérer compliqué car il requiert de la discipline associée à la régularité, mais également une grande dose d’honnêteté…envers vous même.
La neutralité, c’est marquer une distance nécessaire relationnelle, suffisamment proche pour créer une chaleur humaine et un climat de confiance, et suffisamment éloignée pour ne pas être emporté par un courant d’émotions, parfaitement nuisible à votre fonction et à vos collaborateurs.
La neutralité, c’est également considérer que tout ce qui pourrait exagérément vous influencer (émotionnellement) doit être écarté de votre jugement, puis de votre décision.
Enfin, c’est reconnaître que tous les membres de votre équipe doivent bénéficier du meilleur de vos capacités.
L’attitude de la neutralité offre la possibilité mentale d’apprécier à leur » juste valeur » à peu près tous les collaborateurs, mais aussi ses collègues.
La fameuse bienveillance
C’est se programmer à manager avec équité, sans s’autoriser à » ne pas aimer » ni se laisser bercer par » l’agréabilité » d’aimer.